Etoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactives
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le ciré

A la montagne, il fait froid, très froid même ! Vous êtes transpercé dès que vous mettez le nez dehors.

Cette année-là, le ciré est arrivé : jaune, raide, avec des fermetures métalliques dignes de souliers de ski.

Et pas doublé, rien, pas la moindre épaisseur pour lui – et nous – donner de la chaleur.

Mais qu’est-ce que j’ai pu grelotter là-dedans durant mon long chemin pour aller et revenir de l’école ! Je ne parle même pas des récréations pendant lesquelles je ne pouvais pas bouger, toute coincée dans ce ciré de malheur. Son unique mérite était son imperméabilité – ma foi – absolue.

Aujourd’hui il fait un retour en force avec les autres jupes en cuir, pattes d’éph’ et sabots de mon enfance. C’est plus fort que moi, rien que d’en voir un me donne encore la chair de poule.

 

Stanley

C’est la guerre. Tous les hommes sont partis au front. Parmi eux, tes grands frères. Et toi, petit bonhomme de onze ans, seul au milieu des femmes, tu t’ennuies dans cette triste et brumeuse ville du Pays de Galles.

C’est la guerre. Elle n’en finit pas et tu tournes en rond comme un lion en cage. Dans le port, tu vois tous ces bateaux qui partent au loin, là où la mer se confond avec le ciel.

C’est la guerre. Le navire s’éloigne doucement du port et tu entends les cris de ta mère « Reviens, Stanley, reviens. Je ne te punirai pas ».

Tu as onze ans. On te retrouvera deux jours plus tard, bien caché dans la cale. Voguant vers l’Australie, le navire est en haute mer et ne fera pas demi-tour pour te ramener. Ton destin est en marche, ta soif de liberté et d’évasion aussi. Tu deviendras marin et sillonneras les mers pendant vingt ans pour finalement te poser au pied de la Statue de la Liberté. Tu te marieras et auras une fille qui, vingt ans plus tard, partira découvrir l’Europe pour trois mois.

Elle non plus n’est jamais rentrée.