Prairie
Les paupières du jour s’abaissèrent
De la cime des arbres s’élevait,
Une pénombre glauque couvrant l’horizon.
Un vent alizé secouait la verdure ;
Et faisait courir les feuilles mortes sur le sol.
Ce vent libre, joueur et enjôleur,
Continuait son périple sans marquer de trêve.
Le murmure des trèfles, sous mes pas, grésillait légèrement.
Le serein, tombant, y déposait ses empreintes.
Je retournai à la prairie pour y réveiller des souvenirs.
Là-bas, fallait-il que je m’en souvienne ?
On n’oublie guère.
Certains souvenirs s’inhument en soi.
Prairie de nos amours !
Paradis qui abrita notre première rencontre.
Dix-huit mille jours ont coulé
Comme le souvenir fugace d’un nourrisson.
Toujours, ta splendeur alimente
La tendresse dans le tréfonds de mon être.
Je levai la tête vers le ciel ;
Puis les cloches de mon cœur entonnèrent des Te Deum.
Ô rare créature !
Ô muse !
Tu as fait de moi un poète.
Et depuis, je compose des vers pour m’enivrer.
Svelte et élancé, comme l’ombre du jeune Boileau.
Ta voix de mandoline est si douce.
Elle siffle de beaux airs tendres.
Je t’aime Lynn.
Et cette immense prairie reste le témoin de notre amour.
Éboulement
Une avalanche de souvenirs,
Crépite dans ma tête comme du bois sec.
Puis des interrogations sans réponse me lancinent.
La brume bariolée de cet accident,
Se dresse devant moi dans l’air froid du demi-jour.
Le ciel veule croule sur le mépris de mon cœur.
Je tentai d’éteindre l’ardent brasier qui me consumait.
Hélas ! Je ne pus.
La réalité est sous mes yeux.
Je perdis mes membres inférieurs ce jour-là.
Et depuis, je suis perclus.
Dimanche sombre.
Tu resteras, gravé dans les recoins de ma mémoire.
Le hurlement de l’alarme,
Bous encore dans mes entrailles.
Le fantôme de la grotte,
Me hante toujours comme mon ombre.
Jadis, tu étais ma fierté.
Aujourd’hui, tu es,
Le théâtre où sont enterrés mes rêves.
Mes pleurs se déversent dans les oreilles d’un cœur sourd.
Le sol est toujours aride.
Je gis encore dans le flot de promesses.
Pauvre ouvrier !
Ô ciel !
Ton châtiment brûle comme les crocs aigus d’une flamme.
J’écris,
Pour jeter dans l’Achéron toute mon angoisse.
Je suis un martyr de l’existence.
Soir d’été
C’était un soir d’été
La clarté crue de ma lampe donnait dans les bois
La sylve coulait d’une fumée noire
J’auscultais le silence
Pour boire le calice jusqu’à la lie
Dans cette forêt de bois
Ma douleur se transmue en joie
Puis, au son des fifres
Je vagis dans les grumeaux de lait tel un bébé
Dans cette ambiance méditative
Mes souvenirs dodelinaient comme des bougainvillées au passage du zéphyr
Je rompis ce silence
Quand, je pensai aux secousses telluriques
Qui jadis
Ont cloîtré mon âme dans les serres du désespoir