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Tout commence un soir froid et sec d’harmattan. Il était dix-huit heures. Je venais de laisser choir les billets d’avion sur le tapis gris de la chambre à coucher. Je restai étourdie par cette affreuse découverte, une sorte d’apoplexie transitoire. Je n’en croyais pas mes yeux. Je repris mon souffle et les remis à leur place.

Comment cela était-il arrivé ? Mon mari s’apprêtait à aller aux îles Maurice avec une femme… une inconnue. Il m’en aurait sûrement parlé, s’il n’avait rien à me cacher. S’il n’avait rien à se reprocher.

Je recevais des appels anonymes me murmurant qu’il n’était qu’un parfait volage. J’entendais ces rumeurs qui couraient le quartier, sans jamais y prêter attention. Ce matin même, ma meilleure amie m’en avait donné confirmation. Elle aurait vu mon mari sortir d’un hôtel de la place avec sa secrétaire. Je ne l’avais pas crue, même si une part de moi voulait que je pousse mes enquêtes au plus loin. Je l’avais envoyée dinguer, même si le trop-plein de rumeurs m’effrayait déjà. Je lui avais dit que je m’en foutais comme de l’an quarante, même si mon cœur battait sous la lame artificielle d’une trahison.

Ce soir-là, je compris que je m’étais trompée sur toute la ligne. Elle avait raison. Et les autres aussi. Comment a-t-il pu me faire une chose pareille ?

Mon mari serait là d’une minute à l’autre. Il ne fallait pas qu’il sache ce que je savais. Il n’était pas question qu’il se doute de quoi que ce soit. Je lui ferai payer cette trahison, en silence, avant même qu’il ne convole en justes noces avec cette femme. S’il n’est pas à moi, il ne sera à personne.

Je retournai à la cuisine et préparai un ragoût au poulet, son repas préféré. J’ornai la table de lys et de bougies allumées.

Le soir, quand mon mari revint du boulot, j’étais prétendument radieuse. Il me déposa un baiser au front, courut se changer, et me rejoignit au salon. Il se réjouissait de cette surprise que je lui avais réservée. Je sentais qu’il me faisait une nouvelle fois tourner en bourrique. Je le conduisis devant son plat, avec à son cou des baisers à n’en point finir. Mes derniers baisers. Il était tout sourire. Mais je savais qu’il n’était point naturel.

A sa première cuillerée, il s’écroula au sol tel un sac de maïs. J’avais empoisonné son repas.

Ce soir-là, alors que je languissais auprès de son corps, frissonnant et perdue, son téléphone sonna. L’agence de voyage avait fait une erreur sur l’un des billets qu’il avait enregistrés. A la place de mon nom se trouvait une inconnue. Mon mari était tellement fondu dans les nuages qu’il ne l’avait même pas remarqué.

Je compris qu’il s’apprêtait à me faire une surprise, et que tout cela n’était qu’un monstrueux malentendu brodé de rumeurs. Maudit bruit qui me fit croire que mon mari était infidèle.